jeudi 29 mai 2008

La chasse me tue


Dû à mes dernières expériences, j'ai pris la décision d'être un peu moins "pro-active" dans mon approche avec les hommes en cessant tout simplement de semer mon numéro de téléphone aux quatre vents. Cette méthode m'a toujours permis d'obtenir ce que je voulais mais comme ce que je veux a changé, la méthode est desuète. J'ai décidé de chasser un peu plus discrètement, ce que je réussis pas si mal non plus. En fait, quand j'offre mon numéro de téléphone, c'est par impatience bien souvent. Je me suis alors dit que je tenterais de développer ma pauvre et handicapée patience. Apprendre à faire les choses, tranquilement mais sûrement. J'ai travaillé fort et j'ai réussis...Jusqu'à vendredi dernier.


Je travaille dans un édifice où beaucoup de gens circulent. Café, ascenseurs, couloirs, escaliers, extérieur, tout ces endroits sont fréquentés quotidiennement par des tas de personnes que je ne remarque même plus. Il y a un homme que je croise souvent et ce, depuis plus d'un an. Tout ce que je sais c'est qu'il travaille au Xe étage dans le domaine de l'informatique. Sa tenue vestimentaire, bien que parfaite à mes yeux, est toujours un peu négligée et contraste avec les autres monsieurs-complet-cravate qu'on apercoit dans ce building. Sa barbe, aussi foncée que ses cheveux dépeignés, a toujours l'air de ne pas avoir été rasée depuis trois ou quatre jours. Sa voix est rauque, ses yeux sont aussi doux que ceux des petits chiots et il marche avec une nonchalence délicieuse. Il me plaît beaucoup. Je me suis retrouvée dans le même ascenseur que lui plus d'une fois, sans ne jamais le regarder en face. J'estimais moins risqué de le regarder quand il n'en savait rien. J'apprennais si bien la discrétion que j'en étais fière. J'aurais pu me permettre, d'au moins oser un sourire mais ne l'ai pas fait, simplement parce qu'il était toujours avec d'autres hommes, ses collègues probablement. Me planter en abordant un homme, ça fait mal à mon orgueuil. Me planter en abordant un homme, devant d'autres hommes, c'est la catastrophe et la fin de ma dignité. Une fois seulement nous nous sommes retrouvés seuls tout les deux, dans l'ascenseur, pendant une longue et interminable montée de six étages. J'ai regardé mes souliers en retenant mon souffle et suis sortie presqu'en courant quand les portes se sont ouvertes. Puis, je l'ai rapidement et volontairement oublié.


Vendredi dernier, je l'ai aperçu au café, en train de discuter avec H, la serveuse. Comme elle a l'habitude de me piquer un brin de jasette quand elle me voit, elle m'a gentiment inclu dans leur conversation. Elle ne savait pas qu'il me plaisait jusqu'à ce qu'elle me voit rougir. J'ai répondu "oui oui" n'ayant aucune espèce d'idée de quoi il était question. Il m'a sourie et mes neurones se sont évaporées. Nous avons échangé quelques mots superficiels et je me suis sentie si ridicule que je les ai salué rapidement avant de me sauver. Je ne comprendrai jamais pourquoi j'ai le quotien intellectuel qui s'amoindrit quand je me retrouve devant un homme qui m'attire.


Plus tard dans l'après-midi, je suis redescendu au café et la serveuse m'a fait un clin d'oeil avant de me faire la proposition du siècle qui allait foutre en l'air toutes mes bonnes résolutions.


Bonjour Lune, tu es parti un peu vite ce matin... (deuxième clin d'oeil)

Sais-tu ce que tu devrais faire ? Tu devrais m'écrire tout prénom et ton numéro de téléphone sur un bout de papier pour que je le donne à ce charmant jeune homme...Quelque chose me dit qu'il t'appelerait sans perdre une seconde...(troisième clin d'oeil)

Je ne suis pas certaine mais je crois qu'il est célibataire...


Avant son quatrième clin d'oeil, j'avais écris mes infos et tendais le papier vers elle. Ma main tremblait, comme celle de la droguée qui prépare sa précieuse dose. Elle s'est dépêché de le prendre comme si elle avait deviné qu'une seule seconde de plus pouvait me faire changer d'avis. Je me sentais comme l'alcoolique qui accepte la bière offerte comme si la gaffe était moins lourde à assumer quand c'est proposé par quelqu'un d'autre.


Je ne l'ai pas vu de la semaine, et l'aurais sûrement oublié volontairement une fois de plus si H ne s'était pas empressée de m'informer quand elle me voyait. "Il ne travaille pas aujourd'hui". Je ratais, chacune de ces fois, une belle occasion de réparer ma gaffe en lui demandant de jeter mon bout de papier. Ce matin quand je suis arrivée en taxi et en retard, monsieur fumait une cigarrette au soleil devant l'immeuble. Mon coeur a déraillé un peu et j'ai pris mon temps pour payer le chauffeur et...Calmer l'ouragan dans mon estomac encore vide. Juste avant que je sorte, un de ses collègues l'a rejoint...Fiou. J'ai presque couru jusqu'à la porte. Après tout, j'étais en retard. J'ai tout de même senti son regard sur moi et me suis répété une fois de plus qu'il faudrait vraiment que j'apprenne à ne plus être à la dernière minute. Dès ma première pause, je me suis rendu au café pour manger un morceau. La serveuse-entremetteuse m'a acceuilli de son célèbre clin d'oeil.


"il est là aujourd'hui...Je lui parlerai quand il viendra s'acheter son grand café comme à l'habituel...Je vais lui dire que c'est la belle blonde du Xe étage...Attends-toi à recevoir un appel bientôt !"


Heu...Je lui ai demandé de se contenter de dire "blonde" sans le "belle" puisque la beauté est un concept assez relatif. H est adorable mais H n'est plus très jeune et je doute qu'elle connaisse la complexité des hommes d'aujourd'hui, heureusement pour elle. J'aurais dû lui dire que j'avais changé d'idée mais ne l'ai pas fais. J'ai encore manqué une belle occasion de me rétracter et ainsi éviter le désastre. C'était probablement ma dernière chance. Aussitôt arrivée dans l'ascenseur, j'ai regretté ma mollesse. J'ai passé tout l'après-midi paralysée à mon bureau, refusant d'aller où que ce soit. J'avais du travail par dessus la tête...après tout.


Bon ok. J'avais peur. Peur de le croiser après qu'on lui ait donné mon numéro. Ç'aurait été trop pour mon p'tit coeur. J'étais terrorisée, angoissée, remplie d'affreux remords. J'en avais contre mon désir d'avoir tout et tout de suite, et contre cette maudite méthode que je m'étais juré de ne plus utiliser. Parce que c'est enfantin. Parce que ça ne me ressemble plus. Parce que c'est trop direct. Parce que je ne veux plus du rôle de la chasseuse. Parce que...Parce que !


S'il appelle, j'arriverai peut-être à me pardonner cette stupide rechute. Mais il ne le fera pas et je serai forcée d'y repenser, chaque fois que je vais le croiser. Je vais revivre éternellement cette humiliation...Il ne me reste plus qu'à donner ma démission, changer de ville et maudir à tout jamais ces rivières d'hormones qui m'embrouillent trop souvent le cerveau.


Merde ! Pourquoi j'ai fais ça ?!


C'est tout simple. Triste, mais tellement clair. La Chasse, j'en vis et j'en meurs. Je ne peux plus vivre avec, mais n'arrive toujours pas à vivre sans.


4 commentaires:

Cloutov a dit…

Moi j'aimerais voir plus de chasseresses comme toi, ça évite de pas savoir à quoi s'en tenir et au moins, même si ça te pèse quelques fois, ben au moins dis-toi que c'est mieux que de garder ça pour toi pis d'avoir des regrets de ne pas avoir essayé! Qui sait, tu passes p-être à côté de l'homme de ta vie?

Le bémol par contre, c'est que si tu veux une relation plus sérieuse, tu dois faire patienter un peu ta proie pour ne pas que ce soit du "tout cuit" car c'est trop facile et ça manque de challenge...encore là, ça dépend de ce que t'as envie.

Tu vois, moi je pose des collets et toi bien tu chasses au fusil...

volage a dit…

Ce texte là est excellent. Cocassant et ressenti.

Peu importe comment tu chasses, la seule chose que je ne comprend pas dans cette histoire est que personne ne t'ai mis le grapin dessus.

Anonyme a dit…

fuck si c'est vrai et vécu... tu as vraiment besoin d'aide chère!!... oh and thats why im here... god il faut te faire un caractère... un peu d'assurance en toi!!... de la confiance f***!!... après avoir lu tous tes posts ce matin, tu me sembles relativement jolie... pas 300lbs... pas de déformitée majeure de naissance... tu as tout ce qu'il faut pour plaire... être toi même... sorry je suis exaspéré là... mais je suis aussi conscient que plus je continue a lire plus je recule dans le temps... et que ta vie, tes opinions, ta facon d'agir ont tous pu changer 1000 fois depuis avril/mai/juin dernier!!... Juste personellement... en l'espace d'un an... je ne suis pu du tout la même personne... même mes collègues au bureau s'en sont rendu compte... que ma nouvelle assurance me faisait bien... ma facon d'agir, de parler... :)

Anonyme a dit…

Moi, je suis juste curieuse à savoir s'il t'a appelé. Tu as quand même été courageuse de laisser ton numéro, surtout quand on sait qu'on va croiser la personne à tous les jours. Chapeau pour ça.